Loi MNSS – Secret médical, échange et partage d’informations au sein d’une équipe de soins, échange et partage entre professionnels de santé et autres professionnels des champs social et médico-social – Parution de deux décrets.

Au JORF n°0169 du 22 juillet 2016 ont été publiés deux décrets d’application de la  loi MNSS du 26 janvier 2016 :

-> Un décret relatif aux conditions d’échange et de partage d’informations entre professionnels de santé et autres professionnels des champs social et médico-social et à l’accès aux informations de santé à caractère personnel.
-> Un décret relatif à la liste des structures de coopération, d’exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale dans lesquelles peuvent exercer les membres d’une équipe de soins

 

 

Présentation des décrets

Ces deux textes précisent les conditions d’échange et de partage de l’information au sein d’une équipe de soins et entre professionnels de santé et autres professionnels des champs social et médico-social,  ajouts de la loi MNSS au sein de l’article L.1110-4 du Code de la santé publique relatif au secret médical.
 

– Décret n° 2016-994 du 20 juillet 2016 relatif aux conditions d’échange et de partage d’informations entre professionnels de santé et autres professionnels des champs social et médico-social et à l’accès aux informations de santé à caractère personnel.

La loi MNSS a inséré au sein de l’article L.1110-4 du Code de la santé publique cette précision :

 

 » (…) II.-Un professionnel peut échanger avec un ou plusieurs professionnels identifiés des informations relatives à une même personne prise en charge, à condition qu’ils participent tous à sa prise en charge et que ces informations soient strictement nécessaires à la coordination ou à la continuité des soins, à la prévention ou à son suivi médico-social et social. »

 

Le décret vient en décliner les modalités :

Contenu des informations échangées

 

-> Référence : page 15 du document de présentation du volet « santé mentale » de la loi MNSS

 

-Les professionnels participant à la prise en charge d’une même personne peuvent, en application de l’article L. 1110-4, échanger ou partager des informations relatives à la personne prise en charge dans la double limite :
 » 1°) –  Des seules informations strictement nécessaires à la coordination ou à la continuité des soins, à la prévention, ou au suivi médico-social et social de ladite personne ;
2°) –  Du périmètre de leurs missions. »

 

Catégories de professionnels pouvant échanger et partager l’information dans le cadre de la prise en charge d’une personne

 

Les professionnels appartenant aux catégories visées ci-dessous peuvent échanger et partager l’information relative à une personne prise en charge sans qu’il soit nécessaire de recueillir préalablement son consentement.

 

Le nouvel article R.1110-2 du Code de la santé publique dispose :

 

 » Les professionnels susceptibles d’échanger ou de partager des informations relatives à la même personne prise en charge appartiennent aux deux catégories suivantes :
« 1° Les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, quel que soit leur mode d’exercice ( La quatrième partie du CSP est intitulée « Professions de santé » visant , notamment, le médecin, le chirurgien dentiste, le pharmacien, l’infirmier, l’aide soignant, l’auxiliaire médical, l’auxiliaire de puériculture, l’ambulancier, le masseur kinésithérapeute, l’ergothérapeute, le psychomotricien, l’orthophoniste,  le diététicien);

 

« 2° Les professionnels relevant des sous-catégories suivantes :
« a) Assistants de service social mentionnés à l’article L. 411-1 du code de l’action sociale et des familles ;
« b) Ostéopathes, chiropracteurs, psychologues et psychothérapeutes non professionnels de santé par ailleurs, aides médico-psychologiques et accompagnants éducatifs et sociaux ;
« c) Assistants maternels et assistants familiaux mentionnés au titre II du livre IV du code de l’action sociale et des familles ;
« d) Educateurs et aides familiaux, personnels pédagogiques occasionnels des accueils collectifs de mineurs, permanents des lieux de vie mentionnés au titre III du livre IV du même code ;
« e) Particuliers accueillant des personnes âgées ou handicapées mentionnés au titre IV du livre IV du même code ;
« f) Mandataires judiciaires à la protection des majeurs et délégués aux prestations familiales mentionnés au titre VII du livre IV du même code ;
« g) Non-professionnels de santé salariés des établissements et services et lieux de vie et d’accueil mentionnés aux articles L. 312-1, L. 321-1 et L. 322-1 du même code, ou y exerçant à titre libéral en vertu d’une convention ;
« h) Non-professionnels de santé mettant en œuvre la méthode prévue à l’article L. 113-3 du même code pour la prise en charge d’une personne âgée en perte d’autonomie ;
« i) Non-professionnels de santé membres de l’équipe médico-sociale compétente pour l’instruction des demandes d’allocation personnalisée d’autonomie mentionnée aux articles L. 232-3 et L. 232-6 du même code, ou contribuant à cette instruction en vertu d’une convention.

 

-> Lien pour accéder à l’article 411-1 du CASF précité : https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=9EC10FDC037F3CDC84A85A5C3E0E7665.tpdila07v_1?idSectionTA=LEGISCTA000019801535&cidTexte=LEGITEXT000006074069&dateTexte=20160725

 

Dès lors que les professionnels ne font pas partie des catégories listées ci-dessus, il conviendra d’informer préalablement la personne prise en charge, de lui préciser le contenu du partage et l’identité du destinataire de l’information ou sa qualité au sein d’une structure.

 

Telles sont les précisions du premier alinéa du nouvel article R. 1110-3.-I. du Code de la santé publique :

 » Le professionnel relevant d’une des catégories de l’article R. 1110-2 souhaitant échanger des informations relatives à une personne prise en charge, au titre du II de l’article L. 1110-4, avec un professionnel relevant de l’autre catégorie, informe préalablement la personne concernée, d’une part, de la nature des informations devant faire l’objet de l’échange, d’autre part, soit de l’identité du destinataire et de la catégorie dont il relève, soit de sa qualité au sein d’une structure précisément définie. »

 

Seule l’urgence ou l’impossibilité dispenseront les professionnels d’informer préalablement la personne prise en charge, qui devra être informée a posteriori dès que sont état le permet. Ces éléments doivent être tracés dans le dossier médical.

Tel est le sens des dispositions de l’alinéa 3 du nouvel article . R. 1110-3.-I du Code de la santé publique :

 » Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, seule l’urgence ou l’impossibilité d’informer cette personne peut dispenser le professionnel ou la personne participant à sa prise en charge de l’obligation d’information préalable. La personne concernée est toutefois informée, dès que son état de santé le permet, de l’échange ou du partage des informations auquel il a été procédé. Il en est fait mention dans le dossier médical. »

 

Dérogations nouvelles au principe de l’information et du recueil du consentement des détenteurs de l’autorité parentale pour la personne mineure

 

-> Référence : page 45 du document de présentation du volet « santé mentale » de la loi MNSS

La loi 2002-303 du 04 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé avait consacré une autonomie médicale pour la personne mineure dans les situations où cette dernière avait besoin de soins nécessaires s’imposant pour sauvegarder sa santé et qu’elle souhaitait garder le secret vis à vis de ses parents.

 

La loi MNSS du 26 janvier 2016 a étendu le champ dérogatoire en précisant que le médecin ou la sage-femme peuvent mettre en œuvre non plus « un traitement ou une intervention » mais « l’action de prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement ».

 

L’article L.1111-5-1 du Code de la santé publique créé par la loi MNSS dispose :

« Par dérogation à l’ article 371-1 du code civil, l’infirmier peut se dispenser d’obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions à prendre lorsque l’action de prévention, le dépistage ou le traitement s’impose pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure, dans le cas où cette dernière s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, l’infirmier doit, dans un premier temps, s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, l’infirmier peut mettre en œuvre l’action de prévention, le dépistage ou le traitement. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix. »

 

La personne mineure peut se dispenser de l’accord de ses parents dans le cadre de dépistage de maladies infectieuses transmissibles.

 

Le décret vient ainsi actualiser les dispositions règlementaires du Code de la santé publique.

 

Le nouvel article R.1111-6 du Code de la santé publique est ainsi rédigé :

 » La personne mineure qui souhaite garder le secret sur une action de prévention, un dépistage, un diagnostic, un traitement ou une intervention dont elle fait l’objet dans les conditions prévues à l’article L. 1111-5 peut s’opposer à ce que le médecin ou la sage-femme qui a pratiqué cette action de prévention, ce dépistage, ce diagnostic, ce traitement ou cette intervention communique au titulaire de l’autorité parentale les informations qui ont été constituées à ce sujet.

La personne mineure qui souhaite garder le secret sur une action de prévention, un dépistage ou un traitement dont elle fait l’objet dans les conditions prévues à l’article L. 1111-5-1 peut s’opposer à ce que l’infirmier qui a pratiqué cette action de prévention, ce dépistage ou ce traitement communique aux titulaires de l’autorité parentale les informations qui ont été constituées à ce sujet.

Le médecin, la sage-femme ou l’infirmier fait mention écrite de cette opposition.

Tout médecin, sage-femme ou infirmier saisi d’une demande présentée par le titulaire de l’autorité parentale pour l’accès aux informations mentionnées aux deux premiers alinéas ci-dessus doit s’efforcer d’obtenir le consentement de la personne mineure à la communication de ces informations au titulaire de l’autorité parentale. Si en dépit de ces efforts le mineur maintient son opposition, la demande précitée ne peut être satisfaite tant que l’opposition est maintenue.

Lorsqu’en application de l’article L. 1111-7 la personne mineure demande que l’accès du titulaire de l’autorité parentale aux informations concernant son état de santé ait lieu par l’intermédiaire d’un médecin, ces informations sont, au choix du titulaire de l’autorité parentale, adressées au médecin qu’il a désigné ou consultées sur place en présence de ce médecin. »

 

 

Accès au dossier médical par les ayants droit

 

-> Référence : page 17 du document de présentation du volet « santé mentale » de la loi MNSS

Le décret met à jour le Code de la santé publique en ce qu’il rappelle le droit d’accès au dossier médical en qualité d’ayant droit par le concubin et par le partenaire lié par un pacte civil de solidarité.

 

Le nouvel article R.1111-7 du Code de la santé publique dispose :

« L’ayant droit, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité d’une personne décédée qui souhaite accéder aux informations médicales concernant cette personne, dans les conditions prévues au neuvième alinéa de l’article L. 1110-4, doit préciser, lors de sa demande, le motif pour lequel elle a besoin d’avoir connaissance de ces informations. Le refus d’une demande opposé à cet ayant droit, ce concubin ou ce partenaire lié par un pacte civil de solidarité est motivé.

Ce refus ne fait pas obstacle, le cas échéant, à la délivrance d’un certificat médical, dès lors que ce certificat ne comporte pas d’informations couvertes par le secret médical. »

 

Accès au dossier médical par le curateur

 

Le décret précise, en son article 2 que, que le terme « tuteur » est remplacé par les mots : « la personne en charge de l’exercice de la mesure de protection juridique habilitée à la représenter ou à l’assister » au sein de l’article du Code de la santé publique qui liste les personnes habilitées à accéder aux informations relatives à la santé d’une personne.

 

La nouvelle rédaction de l’article R.1111-1 du Code de la santé publique est la suivante :

 » L’accès aux informations relatives à la santé d’une personne, mentionnées à l’article L. 1111-7 et détenues par un professionnel de santé, un établissement de santé ou un hébergeur agréé en application de l’article L. 1111-8, est demandé par la personne concernée, son ayant droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité en cas de décès de cette personne, la personne ayant l’autorité parentale, la personne en charge de l’exercice de la mesure de protection juridique habilitée à la représenter ou à l’assister ou, le cas échéant, par le médecin qu’une de ces personnes a désigné comme intermédiaire. »

 

Désormais, le curateur du majeur protégé peut accéder à son dossier médical.

 

-> Lien pour accéder au texte :https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000032922455&dateTexte=&categorieLien=id

 

– Décret n° 2016-996 du 20 juillet 2016 relatif à la liste des structures de coopération, d’exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale dans lesquelles peuvent exercer les membres d’une équipe de soins

 

-> Référence : page 15 du document de présentation du volet « santé mentale » de la loi MNSS

 

La loi MNSS a  défini la notion d’équipe de soins en son article L.1110-12 du Code de la santé publique :

 

 » (…)  l’équipe de soins est un ensemble de professionnels qui participent directement au profit d’un même patient à la réalisation d’un acte diagnostique, thérapeutique, de compensation du handicap, de soulagement de la douleur ou de prévention de perte d’autonomie, ou aux actions nécessaires à la coordination de plusieurs de ces actes, et qui :
1°) Soit exercent dans le même établissement de santé, au sein du service de santé des armées, dans le même établissement ou service social ou médico-social mentionné au I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles ou dans le cadre d’une structure de coopération, d’exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale figurant sur une liste fixée par décret ;
2°) Soit se sont vu reconnaître la qualité de membre de l’équipe de soins par le patient qui s’adresse à eux pour la réalisation des consultations et des actes prescrits par un médecin auquel il a confié sa prise en charge ;
3°) Soit exercent dans un ensemble, comprenant au moins un professionnel de santé, présentant une organisation formalisée et des pratiques conformes à un cahier des charges fixé par un arrêté du ministre chargé de la santé. »

 

La loi MNSS a également inséré au sein de l’article L.1110-4 du Code de la santé publique cette précision :

 » (…) III.-Lorsque ces professionnels appartiennent à la même équipe de soins, au sens de l’article L. 1110-12, ils peuvent partager les informations concernant une même personne qui sont strictement nécessaires à la coordination ou à la continuité des soins ou à son suivi médico-social et social. Ces informations sont réputées confiées par la personne à l’ensemble de l’équipe.

Le partage, entre des professionnels ne faisant pas partie de la même équipe de soins, d’informations nécessaires à la prise en charge d’une personne requiert son consentement préalable, recueilli par tout moyen, y compris de façon dématérialisée, dans des conditions définies par décret pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »

 

Le décret vient préciser la liste des structures de coopération, d’exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale dans lesquelles peuvent exercer les membres d’une équipe de soins, en son article D.1110-3-4 :

 

 » Les structures de coopération, d’exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale mentionnées au 1° de l’article L. 1110-12 sont les suivantes :
« 1° Les groupements hospitaliers de territoire ;
« 2° Les fédérations médicales inter-hospitalières ;
« 3° Lorsqu’ils ont pour objet la prise en charge médicale coordonnée de personnes, les groupements de coopération sanitaire et les groupements de coopération sociaux et médico-sociaux, ainsi que les groupements d’intérêt public et les groupements d’intérêt économique ;
« 4° Les maisons et les centres de santé ;
« 5° Les sociétés d’exercice libéral et toute autre personne morale associant des professionnels de santé libéraux, lorsqu’elles ont pour objet la prise en charge médicale coordonnée de personnes ;
« 6° Les organisations mises en œuvre dans le cadre des protocoles de coopération prévus aux articles L. 4011-1 à L. 4011-3 ;
« 7° Les plateformes territoriales d’appui mentionnées à l’article L. 6327-2 ;
« 8° Les réseaux de santé mentionnés aux articles L. 6321-1 et L. 6321-2 ;
« 9° Les coordinations territoriales mises en œuvre en application de l’article 48 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 ;
« 10° Les équipes pluridisciplinaires prévues à l’article L. 146-8 du code de l’action sociale et des familles et les équipes médico-sociales intervenant au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie prévue à l’article L. 232-6 du même code.  »

 

-> Lien pour accéder au texte : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000032922503&dateTexte=&categorieLien=id

Valériane DUJARDIN – LASCAUX

Juriste, EPSM Lille Métropole